Un entraînement dégénérant en conflit avec la milice

[Le 1er avril 2012]

Non loin des portes mêmes de Luminis, là où il avait pour habitude de les mener, je suivais depuis un bon moment un second entraînement avec le maître d'armes Harald Thorvaldson avec application et intérêt, quand un milicien survint et nous interrompit sans façon et avec grande impolitesse, avant de se montrer tout à fait agressif en voyant mon épée tirée. Il me menaça de son pistolet tout ne me demandant de lâcher ma lame avec un tutoiement contre lequel je protestai. Alors, il pointa l'arme vers mon visage en déclarant, furieux, que j'avais cinq secondes pour m'exécuter, tandis que messire Harald s'étonnait quand on n'avait rien trouver à redire à ses entraînements auparavant, et quand nous deux avions défendu la ville contre l'embuscade braj d'il y avait quelques temps. Le milicien n'avait cure de nos paroles, pas plus que de mon rôle de vigilant, et je me tint absolument immobile, lançant que si tel était son rôle, alors qu'il assassinât les défenseurs de la ville. Le milicien fit aboutir son décompte, et visa ma jambe ; toutefois, A'gloth ne le voulut pas ainsi, car sa balle manqua sa cible pour s'enfoncer dans le sol.

L'impie n'y vit que de la chance pour moi, l'inverse pour lui, et quand messire Harald tenta de ramener le sujet sur l'église d'A'gloth, le milicien, hors de lui, lui commanda de la fermer et déclara qu'il avait tous les droits. Puis il réclama à nouveau mon arme, mais y ajouta une nouvelle requête, à savoir le paiement d'une taxe pour pouvoir s'entraîner. J'exigeai à nouveau qu'il nous traitât avec plus de respect, et déclarai que je ne pouvais considérer la confiscation de mon arme, que j'avais remise au fourreau dès sa première injonction pourtant, que comme un vol, et que je devrais le châtier comme criminel s'il persévérait. Le milicien était manifestement borné, aussi tirai-je ma lame en me préparant au pire, messire Harald évoquant le lieutenant Calahan sans que cela eût le moindre effet. Les passants commençaient à observer ce qui se passait, et on pouvait même apercevoir quelques membres du Klan.

Ceux-ci déguerpirent toutefois rapidement, quand le milicien, à bout, sortit un cor dont il sonna pour appeler du renfort, qui se concrétisa en cinq miliciens. Je levai alors mon épée pour réclamer l'aide de ceux qui ne voudraient pas laisser dépouiller les saints vigilants d'A'gloth par une garde corrompue ; messire Kraelgor de l'Amicale Ferguson, qui se trouvait non loin, vint se placer à mes côtés avec sa fidèle hache. Messire Harald, lui, resta en retrait, l'arme au fourreau, se proposant simplement de payer la taxe au supérieur des miliciens... Pour ma part, c'était clair : on usait de prétextes anodins pour déclarer la guerre au clergé d'A'gloth. Un lieutenant nous ordonna de leur livrer nos armes, et fit observer que c'était la mort qui nous attendait sinon ; mais il n'était pas question pour moi de laisser dépouiller les preux par une garde qui aurait dû s'occuper des criminels. L'un des miliciens ordonna à messire Harald de se mettre à plat ventre, d'autres le maîtrisant sans qu'il s'y opposât, alors qu'il venait de glisser un mot pour l'église à un spectateur du nom d'Al'ryn qui s'esquiva, tandis que d'autres miliciens affluaient depuis la caserne toute proche.

Je me plaçai en posture défensive, légèrement accroupi derrière mon écu argenté, imité par messire Kraelgor dont le soutien ne se démentit pas, alors que le lieutenant réitéra ses exigences. Je fis remarquer que mon arme avait été mise au fourreau plus tôt et que je n'avais menacé personne d'icelle, de même qu'A'gloth les maudirait tous, comme les criminels qu'ils étaient, pour faire tuer des gens honnêtes sans raison. Au lieutenant qui se voyait comme la loi, j'opposai la justice qu'il ne connaissait pas, alors que toutes les armes étaient braquées sur moi et sur le nain. Le lieutenant sembla commander à un de ses hommes de venir nous prendre nos armes, hésitant peut-être légèrement à nous abattre, et je lançai un regard au brave nain qui allait partager mon sort. Alors, je demandai ce qui se passerait si nous coopérions, et on m'évoqua la prison, ce qui me parut beaucoup sinon à cause de leur haine des vigilants. On fut bien en peine de me donner un motif sinon un argument d'autorité et un port d'armes et une taxe dont on ne m'avait jamais parlé. Était-ce à dire que les vigilants d'A'gloth n'avaient pas le droit de porter une arme ?


Sur ces entrefaites, le père Émile Rédégast survint, très certainement alerté un peu plus tôt sur la tension qui ne faisait que monter sur les lieux, demandant à tous de se calmer pour s'expliquer. Je déclarai qu'on voulait me dépouiller de mon arme comme de mon honneur, quand le lieutenant évoqua des problèmes de port d'arme, de refus de payer la taxe d'entraînement, d'insulte à la milice et de refus d'obtempérer, sans compter le fait d'avoir songé à tuer l'un de ses hommes. Ce a quoi je répliquai que j'avais remis l'arme au fourreau face au premier milicien, qui avait envenimé la situation intentionnellement. : le tarif était toujours le même, déposer les armes, payer les taxes, faire de la prison Toutefois le prêtre se révéla tout autant surpris que j'avais pu l'être, quant au fait que les vigilants n'auraient pas le droit de porter des armes, eux qui contribuaient à la sécurité de la ville contre la criminalité tout comme le mal. Le lieutenant accepta de discuter avec le prélat, mais uniquement celui-ci, menaçant quiconque ouvrirait encore la bouche ; cela s'avéra assez vain, car l'officier confirma que les vigilants n'avaient aucun droit et que la milice était seule – il fallait comprendre là, qu'elle voulait être seule. Le père Rédégast tenta d'en appeler à la foi face à la lettre de la loi, mais le lieutenant avait la nuque raide, posant même ses conditions au prêtre, à savoir notre obéissance, ou la mort.

Je ne pouvais décemment pas causer la mort de mes alliés, aussi déclarai-je au saint prêtre que je suivrais ses ordres au nom d'A'gloth, et que je souffrirais cela par martyre s'il l'ordonnait, ce qu'il ne put que faire bien malgré lui ; alors mon épée fut déposée lentement par terre. Le père Rédégast plaida une dernière fois pour nous, mentionnant notre ignorance des lois et proclamant que les vigilants sauraient à quoi s'en tenir dorénavant, avant de quitter les lieux. Nous fûmes amenés à la caserne où nous dûmes décliner nos identités et subir un interrogatoire, après quoi on nous prit cinquante pièces d'or à chacun pour cause d'entraînement en lieu public, et autres argents pour les taxes personnelles – ce qui s'éleva à un total de cent pièces d'or pour ma part. Bien entendu, nos armes furent confisquées pour motif d'enquête, et nous comprîmes bien qu'il y avait peu de chance de les revoir jamais. On nous épargna toutefois la prison en estimant que la leçon devait avoir été assimilée.

Qu'A'gloth nous prête Sa force contre les tyrans,

Vigilant Clovis Valoris

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